Le 6 septembre, après l’annonce du record mondial des températures cet été, Antonio Guterres, secrétaire général de l’ONU, déclara: « L’effondrement climatique a commencé ». Entre les mégafeux et les inondations exceptionnelles, survenus dans de nombreux lieux de la planète, et les canicules qui s’enchaînent dans nos régions, le réchauffement climatique ne peut plus être nié.
Cet effondrement de notre environnement implique un autre effondrement : celui de notre civilisation basée sur le mythe du progrès et le culte de la performance. Dans La troisième voie du vivant, Olivier Hamant, biologiste et directeur de recherche à l’INRAE, s’appuie sur les processus du vivant pour nous éclairer sur nos responsabilités dans la destruction de notre habitat terrestre. Est en cause notre « course à l’optimisation », cette recherche insatiable de progrès grâce à la performance. Pour atteindre nos objectifs anthropocentrés, nous cherchons à tirer parti au maximum des ressources, sans tenir compte de la complexité des systèmes, par conséquent sans tenir compte des coûts.
Quelle illusion ! Car la quête d’efficacité à tout crin exerce une violence non seulement sur les humains soumis aux impératifs productivistes (cf. Marie Romanens, Maltraitance au travail, DDB, 2003), mais aussi sur le monde autre qu’humain, au point que les comportements des écosystèmes deviennent de plus en plus imprévisibles et rendent notre avenir de plus en plus incertain.
Alors que faire ? Olivier Hamant se tourne vers les sciences de la vie pour proposer un concept comme contre-modèle : la sous-optimalité. Si le monde naturel est robuste, explique-t-il, c’est en raison des erreurs, imperfections, contraintes, lenteurs, fluctuations, incohérences, redondances… qui l’affectent et le rendent adaptable et transformable. « Alors que l’optimisation fragilise, la sous-optimalité utilise les fragilités pour construire de la robustesse. » Parmi les nombreux exemples apportés, Olivier Hamant nous apprend que le nombre de molécules participant au fonctionnement d’une cellule est loin d’être stable. Une molécule peut transitoirement manquer, une autre être surreprésentée. Cette incertitude est profitable à la cellule parce qu’elle lui permet de s’adapter aux fluctuations de son environnement.
Notre société, obnubilée par l’optimum de productivité, devrait s’inspirer de cette capacité à la résilience du vivant. Autrement dit, nous ferions bien de ne plus réprimer notre vulnérabilité mais, au contraire, de la prendre en compte. Le sentiment de vulnérabilité est en effet ce qui nous rend conscients de notre dépendance aux autres, humains et non humains. Il ouvre pour nous un chemin vers « l’infini des interactions » à l’opposé de « l’infini matérialiste ».
Olivier Hamant, La troisième voie du vivant (Odile Jacob, 2022)
Vous pouvez voir également ses trois vidéos, intitulées « Inversion : Naviguer à contre-courant dans un monde incertain » :
https://www.google.com/search?client=firefox-b-d&q=Olivier+Hamant#fpstate=ive&vld=cid:23f1044b,vid:9mj4ZK11oG8,st:0
https://www.google.com/search?client=firefox-b-d&q=Olivier+Hamant#fpstate=ive&vld=cid:7a50688a,vid:1fPTx-x9p_g,st:0